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| Les obsèques de Sohier
Tout ce qui suit est dans Breiz Atao du 31 mars 1935, et confirme lextrême gravité de ce qui est détaillé, en premier lieu pour lactualité de la « Charte des Langues Régionales ». Ce qui sera en gras est souligné par moi, sauf les titres en majuscule.
La mort vient de faucher à limproviste et dans la fleur de lâge, notre vieux camarade Yann Sohier, lanimateur du réveil breton dans les milieux de lenseignement laïc. ( ) Nous navons pas compris tout de suite comment il se pouvait que celui sur lequel reposait tant despoirs soit aussi brutalement enlevé. Quallait devenir son uvre si indispensable, sa revue Ar Falz si nécessaire ? Ce nest pas tout. Avec Yann Sohier, cest un des premiers de la première équipe de Breiz Atao qui sen va. ( ) Yann Sohier sétait signalé à nous la première fois, en 1921, alors quil était élève à l École Normale dInstituteurs de Saint-Brieuc. A peine soutenu de lextérieur il sétait livré, seul, à une action intense dans son école, ce qui lui avait attiré bien des ennuis. ( ) il devient bientôt légendaire. Tout le monde connaît, estime, aime Yann Skolaer . ( ) en toutes circonstances il affirme ses opinions qui sont celles dun séparatisme intégral. Il a des mots célèbres, crachés parfois à la face dun auditoire hostile, qui voudrait lui imposer une parole de concession, une attitude de neutralité. Les premières réunions publiques dans la région du Trégor sont organisées par lui. Déjà, il songe à se consacrer plus particulièrement à la question du breton à lécole et à gagner à ses idées ses collègues instituteurs. ( ) Yann Sohier va devenir « Paôtr Ar Falz », comme il était auparavant à Tréguier « Paôtr Breiz Atao ». ( ) il fonde son Bulletin en 1933 et en fait en moins de deux ans le centre de tout un mouvement en faveur du breton à lécole laïque, auquel sintéressent non seulement ses camarades du Syndicat Unitaire, mais encore des Bretons de toutes opinions. Car la personnalité de Yann préfigurait la communauté bretonne de demain. ( ) Sa pensée surmontait lagonie pour rappeler à ses amis que la tâche bretonne devait passer avant toute considération personnelle. Il nous a par ces paroles légué son testament. Nous sommes sûr que Kerlann, sur qui repose maintenant, avec laide précieuse de Tinael, la responsabilité de la revue, saura continuer dignement luvre de Sohier. Lombre du chef projettera sur la petit équipe d Ar Falz sa présence tutélaire, et les jeunes qui viennent suivront dun pas assuré, et les yeux haut-levés, les traces du grand disparu. Breiz Atao » 171 Donc Sohier est bien « un des piliers de Breiz Atao » 172 depuis 1921. De plus, léloge précise que cest un « Gallo de Lamballe, il a appris le breton ( ) que ses compatriotes ne parlent plus depuis huit cents ans », donc quil est « néo-bretonnant », comme Hemon, Mordrelle, et bien dautres du groupe maurrassien Breiz Atao.
Mon cher Yann, Je prends la parole sur ta tombe au nom de tes plus vieux camarades de combat. Ta mort nous a touché, au plus intime de notre être. Depuis quinze ans, - nos quinze années de plus belle jeunesse, - tes rêves ont été nos rêves, ta foi notre foi, tes douleurs les nôtres et ta vie notre vie. Avec ta mort cest un peu de nous même qui se déchire parce que les premiers Breiz Atao nous nétions quun cur et quun corps. ( ) Puissent-ils se sentir remplis de respect pour le drapeau que tu as servi de toute ton âme jusquà ton dernier souffle et qui ta enveloppé de ses plis aujourdhui. ( ) Nous sommes les hommes du clan. ( ) Et rassures-toi, le travail que tu as entamé avec nous, il y a quinze ans, dautres le continueront jusquà ce que ton rêve chéri soit devenu la réalité : la Bretagne aux Bretons. Breiz Atao ! »174 Quand on voit ce quécris Mordrelle au même moment dans Stur, « qu'il a peu connu, mais auquel il s'était passionnément intéressé » 175, on ne peut que se frotter les yeux et les oreilles.
« Les obsèques de Yann Sohier Malgré cela les camarades de Breiz Atao et dAr Falz ( ) Nous notons au fur et à mesure que nous les reconnaissons, Kerlann, Tinael, Abeozen et sa femme, Mordrel, Drézen, Creston, labbé Perrot accompagné des frères Caouissin, Maître Even et sa femme, Marcel Cachin ( ) Madame Debauvais représentant son mari ( ). A la sortie de léglise, lInspecteur Primaire prend la parole ( ) et, avec tact, sabstient de toute allusion politique. ( ) Jean La Bénelais (Mordrelle), sur la demande de Madame Sohier, va parler au nom de Breiz Atao. ( ) Pour beaucoup, cest une stupeur dentendre les paroles qui vont être dites. Elles sont dites cependant, parce quelles devaient lêtre. Et ce naurait pas été honorer la mémoire de celui qui fut le courage et la loyauté incarnée, que de déguiser une foi que, vivant, il avait toujours hautement proclamée. ( ) Breiz Atao » 177 Marcel Cachin, dirigeant du PCF, en a-t-il tiré des décisions ? Beaucoup dautres ont été ou seront stupéfaits, moi le premier. 171 Breiz Atao n° 220, 31 mars 1935
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