Perrot à Scrignac
 

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Perrot à Scrignac

LE PRESBYTÈRE DE SCRIGNAC ÉTAIT UN VÉRITABLE NID DE VIPÈRES
Cache d’armes des nationalistes, il était un rendez-vous de dignitaires de la Gestapo et du P.N.B. de 1939 à 1944

 

L’historiographie qui recouvre les années de la seconde guerre mondiale en Bretagne comporte déjà une volumineuse production. Elle est très diverse dans sa qualité, mais au fur et à mesure les informations s’accumulent, les croisements deviennent possibles et les controverses s’en trouvent plus étayées. L’ouverture des archives, passés les 60 ans de distance, laisse place à une nouvelle moisson.

Dans l’ensemble, un ouvrage d’historien reconnu, Henri Fréville, émerge. Écrit, il y a un quart de siècle, essentiellement sur la base d’étude de documents de l’administration militaire allemande en France, « Archives secrètes de Bretagne 1940-1944 » vient d’être réédité par les « Éditions Ouest-France » avec des notes rectificatives qui en rehaussent le caractère sérieux et l’enrichissent notablement. En 1985, lors de la parution de la 1ère édition un article du « Pays Breton » et des déclarations du Président de l’Union des Sociétés Bretonnes tirent grand bruit au sujet de Roparz Hémon. Depuis, au fur et à mesure, des éléments nouveaux apportent de la lumière pour mieux lire ces années noires.

Le « H » des allemands

Il y a la thèse de Ronan Calvez sur « la radio en langue bretonne » éditée par les Presses Universitaires de Rennes. Elle n’est pas passée inaperçue. La mise en exergue du caractère totalitaire des ultra-bretonnistes et l’observation de l’abandon du breton par l’église entre les deux guerres firent quelques remous. Il y revint lors d’un colloque à Brest où il évoqua aussi l’introduction, par les allemands, du H dans la langue bretonne. Dans ce même colloque, Michel Denis, se demande « quel intérêt il peut y avoir à revenir sur l’histoire du mouvement breton pendant la guerre...
Il paraît irrité par la poursuite des recherches. Or, dans le même temps, il souligne l’apport d’un nouvel ouvrage. Ainsi, le renvoi n° 7 de son intervention précise : « sans élucider totalement le comportement de l’abbé Perrot, les informations nouvelles fournies par Kristian Hamon , « Les nationalistes bretons sous l’occupation » (Ar Releg-Kerhuon, An Hére 200l)sur les imprudences malveillantes du recteur de Scrignac (p. 161-162), montrent au moins qu’on ne peut plus soutenir qu'il a été exécuté sans raison ».

Les visiteurs du Curé...

Précisément le dernier livre de Kristian Hamon sur « Le Bezen Perrot » (Éditions Yoran Embanner), malgré la volonté manifeste d’expliquer, d’excuser, voire d’absoudre le curé, est terriblement accablant. (Voir l’éditorial). Pour la défense, l’auteur appelle à la barre de multiples auteurs qui n’ont pas grand-chose à voir avec les archives et recherches actuelles. Ainsi est cité ce texte de l’abbé Poisson qui date de 1955 : « L’assassinat de l’abbé Jean-Marie Perrot, le 12 décembre 1943, plus connu, et à qui on ne pouvait reprocher que son ardente fidélité à la Bretagne, constitue un crime odieux et ne peut s’expliquer que par le régime d’anarchie et de totalitarisme qui fût la marque de cette période ». Sont cités dans le même registre, Thierry Guidet et Bernard Le Nail.

Malheureusement pour eux, le chapitre qui suit, basé sur la relation des faits et intitulé « un presbytère bien occupé », situe le niveau de collaboration de Perrot avec les nazis : « Tout au long de l’occupation, l’abbé Perrot va recevoir sans discernement les nationalistes bretons les plus en vue, comme les plus compromis avec les Allemands. ils ne seront pas les seuls à franchir la porte du presbytère de Scrignac. Dès novembre 1940, le Docteur Benning et Joseph Otto Plassmann, ce dernier directeur du "Bureau II des questions raciales de la S.S." » chargé par Himmler de mener des investigations approfondies sur place afin de brosser un tableau précis de la situation ethnique de la Bretagne, ainsi que de l’état du Mouvement autonomiste breton, font le déplacement jusqu’à Scrignac. Gerhard von Tevenar, un des meilleurs soutiens du P.N.B. (Parti Nationaliste Breton) d’avant-guerre, fondateur de la « Société allemande d’études celtiques »  et par ailleurs agent de l’Abwehr, fera de même. Sans parler du très germanophile abbé Gantois souvent menacé, lui aussi, de quelque « coup de crosse épiscopal » en raison de ses activités culturelles et nationalistes flamandes. Debeauvais, accompagné de Grimm, officier du S.D. (Service de Sécurité des S.S. - N.D.L.R.) se rend également chez l’abbé le 13 août1942 (p41).

Efficace avec ses délateurs

Une précision qui vaut son pesant de souffrances et de sang est fournie à la page 87 concernant le visiteur de Perrot. A propos du service de renseignements et de sécurité de Rennes et de son chef le colonel Pulmer, on peut lire : « Son bras droit Hans Grimm, un adjudant de 45 ans qui parle parfaitement le français, occupe une maison avec sa maîtresse, originaire de Bruz, au 26 rue Ste Mélaine à Rennes. Si l’on en juge par les dégâts qu’il fit parmi la Résistance en Bretagne et la faiblesse de ses effectifs - 70 agents et 15 secrétaires - ce service de police est d’une redoutable efficacité ; elle repose essentiellement sur les renseignements fournis par les nombreux délateurs et indicateurs... ».

À ta page 43, il est question de manoeuvres des Bagadou Stourm (groupes de combats), le 7 août 1943, qui se terminent à Scrignac. L’abbé Perrot sympathisait fortement avec le P.N.B.. Il avait donné l’hospitalité aux Jeunes des Bagadou Stourm qui manoeuvraient dans le Finistère et dont les deux chefs, Goulet et L’Haridon, avaient été arrêtés parla police française et relâchés par les Allemands.

Ferrand a exécuté 50 Résistants

Les nationalistes bretons, membres du Bezen Perrot ou pas, ont guidé tes nazis vers les maquis, vers les fermes qui hébergeaient ou ravitaillaient les Résistants, vers les domiciles des FTP ou de familles connues pour leur sympathie ou leur soutien à l’action contre l’occupant. De St Vincent-sur-Oust à Malestroit, de Ploerdut à Bubry, de Callac et St-Nicolas-du-Pelem à l’Hermitage-Lorge, de Scrignac et Huelgoat à Pluméliau, de Guémené-sur-Scorff à Trébrivan, à Bourbriac, Loudéac, Carhaix, Guingamp... la liste est longue des lieux où ont sévi ces massacreurs et tortionnaires de Résistants. Un de ces sbires raconte lors de son interrogatoire (4 novembre1944) :« Ferrand a déclaré devant moi avoir exécuté plus de 50 FFI ou FTP d’une balle dans la nuque ou à coups de mitraillette ».

Targaz « a raconté qu’il avait, avec des Feldgendarmes, enterré vivant un prisonnier blessé, l’avoir ensuite déterré et comme il vivait encore, achevé d’une rafale de mitraillette ».

C’est un aperçu de l’ignominie des nationalistes bretons à l’oeuvre de concert avec les SS.


Ernest Le Barazer

Voir " La Résistance au banc des accusés "

 

  

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